Introduction

Comment les espaces que nous habitons agissent-ils sur nos vies et nos souvenirs? Par quels empilements, quels effondrements intérieurs passons-nous durant toute une existence? Formée dans un lieu — la Manufacture de Lausanne — où se taillaient autrefois des pierres précieuses, Emilie Blaser travaille depuis 2011 sur les points de rencontre entre deux disciplines qui la passionnent: le théâtre et l’architecture.

Le langage du théâtre et celui du bâtiment se retrouvent dans l’idée de «situation construite», expression empruntée à l’artiste Tino Sehgal qui définit la forme vers laquelle tendent les spectacles de la Distillerie Cie: des pièces créées et jouées dans des lieux choisis pour la force de leur architecture ou de leur histoire, utilisant l’espace tel qu’il se présente sans le dénaturer, envisagées comme des rencontres entre plusieurs disciplines (texte, musique, danse, vidéo…) et invitant le public à déchiffrer, en compagnie des artistes, un palimpseste insoupçonné de pierres et d’existences.

A la fois personnage principal et décor unique de la représentation, le lieu dicte sa forme au spectacle. Combien de fois arpentons-nous, tête baissée, notre environnement de vie sans prêter attention aux détails de son architecture? Avec un faible pour les perles de délabrement, les édifices incongrus et le secret des jardins empierrés — bref, tout ce que le photographe Michel Denancé désignait sous le nom de «petites agonies urbaines» —, la Distillerie Cie convoque ici et maintenant l’esprit du lieu pour le faire revivre. Un théâtre immédiat, libéré de ses espaces de jeu traditionnels et dans lequel les expériences et les souvenirs de chacun peuvent se déployer.

nos projets

En septembre 2012, la Distillerie Cie inaugure sa démarche avec la création de Je ne fais que passer, voyage initiatique vers l’au-delà joué au Crematorium de La Chaux-de-Fonds et inspiré par l’architecture de ce lieu. Après des incursions dans le répertoire contemporain (Les Trublions de Marion Aubert, joué en 2013-2014 en Suisse romande) et la création d’un spectacle pensé comme un album de rock célébrant les pulsions de vie et de mort de personnages échappés du «Club des 27» (Tu nous entends? présenté en 2015-2016 à Lausanne, Neuchâtel et Genève), Emilie Blaser reprend le travail autour des questions d’architecture et de théâtre lors de sa résidence d’artiste à la Cité Internationale des Arts de Paris, où elle développe en 2016 le projet des Petites agonies urbaines, «situation construite» en deux volets: l’un présenté dans l’enceinte du Centre culturel suisse et l’autre dans la cour de l’immeuble 17 Rue des Suisses dessiné par Herzog & de Meuron. En 2018, deux spectacles sont créés, l’un à partir d’une chambre d’hôtel au Théâtre Saint-Gervais, l’autre imaginé sur mesure pour le bâtiment du Théâtre Am Stram Gram à Genève. En 2021, le spectacle Vingt ans de Passage!est présenté pour les vingt ans du théâtre du Passage à Neuchâtel.

Emilie Blaser

Née à Neuchâtel en Suisse. Elle étudie l’art dramatique aux Cours Florent à Paris puis à la Manufacture — Haute Ecole des arts de la scène à Lausanne, où elle travaille notamment avec Jean-Yves Ruf, Denis Maillefer, Anton Kouznetsov, Lilo Baur. Durant ses études, elle obtient plusieurs prix (Bourse de la Fondation Jéquier, Prix d’étude d’art dramatique de la Fondation Friedl Wald) et elle est choisie en tant que jeune talent du cinéma Suisse (Junge Talente) et travaille avec Jacob Berger. Depuis 2010, elle joue dans de nombreux spectacles en Suisse (avec Nathalie Lannuzel, Nicolas Gerber, Heidi Kipfer, Frédéric Polier, Pierre Lepori, Latifa Djerbi, Nathalie Cuenet, Stefan Kaegi de Rimini Protokoll, Cosima Terrasse du Collectif Laokoon) et en France (au Festival d’Avignon 2010 sous la direction de Mathieu Bertholet, puis avec Marion Aubert et Marion Guerrero, Alexandra Badea, Yann Verburgh, Cyril Teste et Joël Jouanneau).

En parallèle, elle enseigne régulièrement dans des écoles supérieures de théâtre (Teintureries Lausanne, Conservatoire Genève, Ecole du Théâtre du Pommier Neuchâtel, Cours Florent Paris). Engagée par le Comité de l’association de La Distillerie Cie à Neuchâtel depuis 2011, Emilie Blaser explore la question du lien entre l’architecture, le théâtre et la mémoire. Depuis 2014, elle travaille également ponctuellement au sein du Collectif Sur Un Malentendu avec quatre autres comédien·ne·s issu·e·s de la Manufacture. Entre 2012 et 2016, elle entre à la RTS où elle présente la météo, et depuis prête régulièrement sa voix pour différentes émissions, documentaires ou films publicitaires.